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Les Canadiens français ont toujours été d’ardents voyageurs. Les premiers colons français ont quitté leur terre natale pour les côtes lointaines de l’Amérique du Nord. À partir de ce moment, ils ont eu à rencontrer de nouvelles personnes, que ce soit d’autres colons ou des membres des Premières Nations. Ils partageaient de nombreuses similitudes avec les autres colons venus des six coins de l’hexagone français, mais aussi plusieurs différences. Quant à leurs relations avec les Premières Nations, ponctuées de guerres et parfois d’amitiés, les colons français avaient peu en commun. Cependant, il était clair pour eux qu’ils devaient apprendre à s’adapter à leur nouvel environnement et à travailler les uns avec les autres pour mieux survivre.
La Nouvelle-France était un endroit merveilleux, magnifique et dangereux. Plusieurs colons se sont établis près des centres urbains naissants, mais la plupart d’entre eux ont continué à repousser les limites de la nature sauvage. Plusieurs ont rejoint les rangs des voyageurs, des marchands de fourrure, des coureurs des bois ou des hommes du nord*, poussés par la demande en fourrure de l’Europe. Des siècles plus tard, même au 20e siècle, il était encore commun pour les habitants de quitter leurs foyers et d’aller trouver du travail sur les chantiers où ils étaient forcés de vivre entassés les uns sur les autres pendant tout l’hiver puis de risquer leurs membres lors de la drave au printemps**. Le travail des Canadiens français était souvent dangereux, spécialement après le Traité de Paris, quand les colonies de la Nouvelle-France ont été cédées à la Grande-Bretagne.
Cet esprit voyageur, presque itinérant, trouvait écho dans les contes, racontés par de nombreux conteurs locaux. Dans ces histoires merveilleuses, on trouve souvent un héros éponyme, généralement Ti-Jean, qui quitte le confort de la maison de ses parents pour aller chercher sa fortune dans des pays lointains. Dans ces contes, qui sont séparés en étape de voyage, le héros rencontre des créatures fantastiques, des fées et des monstres, certains lui offrant de l’aide et d’autres lui mettant des bâtons dans les roues. À la fin du voyage au travers des mondes enchantés, Ti-Jean est souvent récompensé par des richesses, l’amour et la renommée***.
Lorsque comparé aux traditions spirito-engagées du monde, on commence à détecter dans les contes tels que rapportés par les conteurs des similarités frappantes. Ces similitudes pourraient provenir de la relation intime entre le conte et le théâtre sacré depuis des temps immémoriaux. Comme le chaman, le conteur Canadien français s’enveloppait dans le tissu de leurs contes. Pour rendre crédible une histoire incroyable, les conteurs pouvaient terminer leurs contes par une courte phrase attestant qu’ils avaient vu les événements de leur récit et qu’ils avaient été envoyés par le monde pour les partager. Comme le conteur avait la capacité de modifier et de sculpter l’histoire qu’ils contaient. Ils ajoutaient à leur récit les personnages et les endroits qui parlaient à leur auditoire. À sa façon, le conteur était le capitaine d’un vaisseau fantastique dirigeant l’imagination de l’équipage, l’auditoire, au travers un monde surnaturel si loin de leur rivage habituel. Le conteur, tout comme le Baptiste de la Chasse-galerie d’Honoré Beaugrand guidant des bûcherons chez eux à bord d’un canot volant, était le navigateur des mortels dans leur voyage dans l’Au-delà****
Pour ceux qui voyageaient, par nécessité ou par goût de l’aventure, chaque voyage était un pèlerinage. Que ce soit pour la traite des fourrures ou pour aller travailler sur les chantiers, on partait pour l’arrière-pays comme on partait en pèlerinage pour atteindre son rêve de sécurité financière et augmenter sa renommée. En route vers le nord, on passait par plusieurs coudes de rivière dont les rives étaient parsemées de croix. On avait coutume d’arrêter à ces endroits pour offrir nos respects à ceux décédés avant nous. On pouvait demander l’assistance des saints, des esprits locaux, du Bon Dieu et même du Yâble dépendant des circonstances.
C’était des gens pragmatiques vivant à l’extérieur des limites familières de leur société et il arrivait qu’ils flirtent avec la damnation éternelle, aux yeux de leurs prêtres de paroisse, pour arriver à leurs buts dans un monde impitoyable. Ce monde, rempli d’esprits puissants, ne bénéficiait pas toujours de la rigueur religieuse de la société civile. Parfois, pendant un voyage, on concluait des accords avec des êtres condamnables, ou à peine tolérables, par le Catholicisme, afin de passer au travers des épreuves de la vie.
Connaissant ceci de l’esprit des Canadiens français et étant nous-mêmes les héritiers modernes de ce même esprit avec un intérêt pour l’ésotérisme, nous pouvons utiliser les contes traditionnels et les coutumes de voyage pour préparer nos voyages spirituels. C’est entièrement possible d’utiliser les contes comme une carte routière pour développer une tradition enracinée dans cet héritage culturel. Nous, les sorcières et sorciers canadiens-français, sommes les nouveaux Ti-Jean et Parlafines. Les rigueurs des voyages physiques des voyageurs, les mondes imaginaires fantastiques des conteurs et la sainteté des pèlerinages des pieux catholiques nous fournissent tout ce dont nous avons besoin pour faire nos propres voyages spirituels dans l’Au-delà.
De temps en temps, nous partagerons nos carnets de voyage avec vous dans le but que vous puissiez avoir une idée de ce qui est possible de faire avec le matériel que nous avons sous la main. Bien que la majorité des conteurs traditionnels aient disparu, notre génération peut donner un nouveau souffle de vie à la tradition en introduisant les différents personnages des contes populaires dans nos propres voyages sorciers. En présentant notre gnose expérimentale à ceux qui veulent bien nous lire, nous espérons les inspirer pour leurs propres voyages.
* https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/traite-des-fourrures
** https://fortsdenotrehistoire.com/drave-et-camps-de-bucherons-2/
*** For more on French Canadian folktales, see Contes Populaires première séries
**** http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Beaugrand-legendes.pdf
The Voyage: A sorcerer’s pilgrimage
The French Canadian people have always been ardent travellers. As a colonial people, the first French settlers left their homeland for the distant shores of North America. From that moment on, they had to meet new peoples, whether other colonials or indigenous peoples of this land. With their fellow colonials from the six corners of the French hexagon, they shared some similarities but also many intrinsic differences. When it came to their relationship with indigenous peoples, which was fraught with war and sometimes friendship, the early settlers held little in common. However, what was clear to them was the need to learn how to adapt to their new homeland and work together with others to best succeed.
New France was a wondrous, beautiful and dangerous place. Although many French began settling in the growing urban centres, the vast majority of them continued to push forward into the wild frontier. Many joined the European frenzy for North American furs, becoming voyageurs, fur traders, coureur des bois and hommes du nord*. Centuries later, even into the 20th century, it was still common for the habitants to leave their homesteads in search of work in the distant timber shanties where they would be forced to live in close quarters throughout the harsh winter months only to risk life and limb on the log drives in the spring**. For the French Canadians work was often of a precarious nature, especially after the Treaty of Paris when the colonies of New France were turned over to Great Britain.
This traveling, if not almost itinerant, spirit was echoed in the folktales told by the many local storytellers called les conteurs. In these wondrous tales we often find an eponymous hero – usually Ti-Jean – who leaves the relative comforts of his parents’ homestead in search of fame and fortune in distant foreign lands. In these tales, which are broken up into “travelling episodes” we find the hero meeting fantastic creatures, fairies and monsters, some offering him help while others attempt to hinder his quest. By the end of his journey or voyage through an enchanted world, Ti-Jean is often rewarded for his efforts with riches, love and fame***.
When compared to the world’s spirit-engaged traditions, we begin to detect in the contes – as related by the conteurs – striking similarities. These similarities may stem from the close relationship shared between storytelling and sacred drama since time immemorial. Like the shaman, the French Canadian conteurs immersed themselves into the fabric of their tales. To lend a degree of credibility to the often incredible material, the conteurs would conclude their stories by making a short remark that they had witnessed the events themselves and that they were in turn sent to the audience in order to relate the recounted events as eyewitnesses. As the conteurs had the distinct ability to shape the story they were telling, they would weave into the narrative people and places which spoke to the audience they were performing for. In this way, the conteur was as though the captain of a fantastic ship – the audience, the crew – who steered their imaginations through a supernatural world beyond their humble familiar shores. The conteur, much like the famed character Baptist from Honoré Beaugrand’s rendition of La Chasse Galerie leading home-sick woodsmen home on his flying canoe, was a navigator of a mortal’s voyage into l’Au-delà****.
For a people who travelled so much out of necessity or a spirit of adventure, each voyage was a pilgrimage. The fur traders or woodsmen heading into the vast forests, leaving their homes and traveling through the hinterland were on a pilgrimage to fulfill their dreams of financial success and win their renown. On their way north, they would pass the many bends of violent rivers where crucifixes darted the shores. It was customary for the voyageur to make stops at these places and to pay their respects to those who died on their voyage. Saints, local spirits, the Bon Dieu and even the Yiable would be petitioned in some way to offer assistance to the traveller as circumstances and necessity dictated.
They were a pragmatic people living beyond the familiar bonds of their orthodox society who would flirt with eternal damnation – in the eyes of the parish priests – to win their lot in an unforgiving world. This world, filled with powerful spirits did not always benefit from the religious rigours of civil society, at times on one’s voyage deals were struck with beings considered anathema to Catholicism (or barely tolerated) in order to get through life’s hardships.
Knowing this of the French Canadian spirit, we as modern inheritors of that same spirit, with an interest in the arcane, can use the folktales and voyaging customs of the past to inform our own well needed spiritual voyages. It is fully within our capability to use the old tales as a roadmap to develop a spirit-engaged tradition entirely crafted from this cultural legacy. We, the French Canadian sorcerers, are the new Ti-Jeans and Parlafines of our modern age. Thus, the physically treacherous voyages of the elder voyageurs, the fantastically imaginative world of the conteurs and the saintly pilgrimages of the devout colonial Catholics provide the French Canadian sorcerer everything required to make our own powerful spiritual voyages into l’Au-delà.
From time to time, we here at Courir le loup-garou, will share with you our own voyages travel logs so that you may witness what is possible with the material we have at hand. Although most of the old conteurs are now long and gone, our generation can reinvigorate the tradition by weaving together the various characters of the manifold contes populaires into our own sorcerous journeys and present our experiential gnosis to the readership to serve as inspiration in your own personal voyages.
* https://www.thecanadianencyclopedia.ca/fr/article/traite-des-fourrures
** https://fortsdenotrehistoire.com/drave-et-camps-de-bucherons-2/
*** For more on French Canadian folktales, see Contes Populaires première séries by Marius Barbeau
**** http://beq.ebooksgratuits.com/pdf/Beaugrand-legendes.pdf