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Pour ce billet, nous jetterons un coup d’œil sur quelques personnages et un lieu du conte « Le Château de Félicité »(1). Ce conte m’a toujours grandement intéressé, car il est rempli de petits morceaux extraordinaires, parfait pour le.a Sorcier.ère.
La chose qui sort le plus de l’ordinaire dans ce conte c’est que le héros est en fait une héroïne. Dans cette histoire, il n’est pas question de Ti-Jean ou d’un autre protagoniste généralement masculin qui viendront sauver la mise. Non, ce sera une de trois sœurs qui vit avec son père âgé à l’orée de la forêt.
L’histoire débute abruptement alors que le père qui est en train de ramasser du bois pour le feu. Soudainement, un petit lièvre sort de nulle part et dit au père que vu qu’il a pris des branches, il a perdu sa fille cadette. Nous ne sommes pas certains de ce à quoi le lièvre pensait, car cette histoire à escalader rapidement, mais pour le lièvre c’était justifié, car il était véritablement un prince charmant piégé dans un corps de lièvre.
Éventuellement, la fille accepte et se marie avec le lièvre. Nous apprenons alors que le lièvre n’est pas seulement un prince, mais c’est aussi le Maître de la forêt. Il doit prendre la forme d’un lièvre pendant le jour et redevient un prince la nuit. Il doit subir cette transformation pendant un an et un jour et revêtir l’une des 366 peaux de lièvre en sa possession. Il redeviendra alors un prince à temps plein.
Il ramène son épouse dans son château au creux des bois. Cette dernière n’apprécie guère le changement de forme du prince et elle décide de brûler les peaux restantes dans le foyer, croyant ainsi délivrer le prince du mauvais sort. Seulement, le prince s’enfuit dans un royaume très lointain. Il promet que si elle ne le retrouve pas à l’intérieur d’un an et un jour, ils ne seront plus mariés. Pour l’aider dans sa quête, il lui donne un mouchoir avec son nom brodé dessus.
Ce pays lointain dont il est issu en est un très mystique. Il vient du Château de Félicité, un magnifique château suspendu par quatre chaînes dorées au sommet d’une montagne de verre. Il sera difficile à la plus jeune des soeurs de le retrouver en un an et un jour. Elle est pourtant bien résolue à réussir et obtient l’aide d’une vieille femme dans les bois. Cette femme est la mère des Quatre Vents : Vent-du-su, le Vent-d’est, le Vent-de-nord et le Vent-de-l’ouest. Si vous voulez vous familiariser avec ces quatre géants des vents, voyez ce billet.
Les vents sont bien bougons et ils ont très faim quand la jeune fille les approche. Les trois premiers frères n’ont pas été assez loin dans leurs voyages pour avoir croisé le Château de Félicité, mais le Vent-de-l’ouest, lui, oui. Il décrit la montagne comme étant toute faite de verre facetté. Il promet d’y retourner et de prendre l’épouse esseulée avec lui, mais il doit d’abord manger une « bouillie sucrée » pour lui donner de la force.
Avant qu’elle ne parte, la vieille femme lui donne trois objets: un rouet, une quenouille pour le rouet et une paire de ciseaux. Elle prédit que la jeune fille en aura besoin.
Une fois que la cadette arrive au Château de Félicité, elle trouve son chemin jusqu’aux cuisines royales. Il semblerait que le Maître de la forêt doit se marier dans deux jours! La première épouse devisa alors un plan où elle prétend travailler aux cuisines pour pouvoir lui donner subrepticement le mouchoir brodé. Il semble que le prince ait tout oublié de son passage dans la forêt sous forme de lièvre.
La nouvelle fiancée se trouve bien impressionnée par le rouet, la quenouille et les ciseaux de la première épouse, si impressionnée en fait, qu’elle accepte de changer de place avec la première épouse avant le mariage. La jeune cadette fut alors en position de tout expliquer au Maître de la forêt et de lui rappeler la promesse qu’il lui avait faite. Alors ce dernier expliqua la situation à son père le roi. En temps opportun, le royaume revient au jeune prince ainsi que le Château de Félicité. Les deux époux vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours.
Observations:
Ce conte partage beaucoup de similarités avec les histoires de loup-garou. On ne nous dit pas pourquoi le prince est transformé est lièvre, mais il doit revêtir des peaux rappelant les « haires » des loups-garous (vous pouvez en lire plus ici). L’utilisation de la terminologie « délivrer » afin de briser le mauvais sort obligeant le prince à se métamorphoser est exactement la même terminologie que celle utilisée avec les loups-garous. Aussi nous savons que les loups-garous canadiens-français n’ont pas besoin de prendre la forme d’un loup, ils pourraient aussi bien prendre la forme d’un lièvre.
La montagne de verre est un élément de conte retrouvé au travers de toute l’Europe. On le retrouve surtout en Pologne, en Russie et dans les contes allemands. Cependant le motif Arne-Thompson 530 « princesse sur une montagne de verre » est très répandu. Certains chercheurs spéculent que ce motif forme une partie des couches sous-jacentes indo-européennes ou que ce motif était important aux peuples cavaliers et s’est répandu de cette façon. Vous pouvez lire plus à propos de ces théories ici.
Cette histoire fut collectée par Marius Barbeau comme une partie de sa série ethnographique des Contes populaires. Elle fut contée par Narcisse Thiboutot de Sainte-Anne, Kamouraska en août 1915. Narcisse indique qu’il l’a lui-même entendu une cinquantaine d’années plus tôt de son oncle Charles Francoeur. Alors, environ en 1865, Narcisse entend le conte du Château de Félicité. Ce fait est intéressant, car le motif de la montagne de verre fut limité à l’est en France. Ce motif n’était donc pas très populaire en France. Comment ce motif de l’est et du nord de l’Europe put-il se retrouver à Kamouraska? Il y a certainement de nombreuses théories, mais nous ne le saurons probablement jamais. Ce qui est important c’est que l’on continue de raconter l’histoire du Château de Félicité pour toutes ses petites parcelles de magie et que l’on puisse les utiliser dans nos voyages spirituels.
For this post, we will be looking at a few beings and a location from the contes “Le Château de Félicité” (the Felicity Castle) (1). This tale has always been of great interest to me as it is full of amazing tidbits that are the perfect fodder for a burgeoning Sorcier.ère.
I think the most amazing thing about this tale, first and foremost, is that the hero is a heroine. In this story, it isn’t Ti-Jean or some other, typically male hero that comes in and saves the day. Nope, it’s one of three sisters who live with their elderly father at the edge of the woods who will come to save the day.
The story kicks off quite abruptly when the father is collecting some sticks for firewood and, all of a sudden, a little hare pops up out of nowhere and tells the father that, since he took the branches, he now has to forfeit his youngest daughter. Not sure what the hare was thinking, because that definitely escalated quickly, but for him it was justified as it is revealed he is really a handsome prince trapped in a hare’s body.
Eventually, the daughter complies and she marries the hare. It is revealed that this hare isn’t just a handsome prince, but he is also the Lord of the Forest. As the story goes, he has to take the form of a hare by day, but he is a prince by night. This is due to him having three hundred and sixty-six hare pelts he must wear daily. He has to go through them all before his curse is lifted and he is to become a full-time prince again.
He eventually takes his new bride home with him to his castle in the woods, but as it turns out, she isn’t much of a fan of his shapeshifting and so she decides to burn his pelts in the hearthfire. This she believed would deliver him from the curse sooner. But, as a result, he flees to go back to his far off land. He vows that if she can’t find him within a year and a day, they will no longer be married. To help her find him, he gave her a monogrammed handkerchief with his name on it.
This far off land he is from is a mystical one. It turns out that he hails from the Felicity Castle, which is a beautiful castle suspended from four golden chains over top of a glass mountain. This is a tall order for her to find him within that year and a day. However, she resolves to do so with the aid of an old woman in the woods.
This old woman, it is revealed, is the mother of the Four Winds: Vent-du-su, le Vent-d’est, le Vent-de-nord et le Vent-de-l’ouest (Southerly Wind, Easterly Wind, Northerly Wind and Westerly Wind).
You should be familiar with the Four Wind giants from this post here. The winds are very grumbly and hungry when the heroine comes across them. None of them had went far enough in their day to have come across the Felicity Castle, but le Vent-de-l’ouest had. He described the glass mountain as being all made of glass and faceted. He vowed to go further and take the lonely bride, but first he needs to eat a bouillie sucré (sweet boil, likely gruel) to get the strength.
Before she and the wind head out, the old woman gives her three special items. She gave her a spinning wheel, a pair of scissors and a distaff. She said to the young girl that they would come in handy.
Once the wind and his passenger came to the Felicity Castle, she made her way into the royal kitchen. It turns out that the Lord of the Forest was getting married for a second time in two days. The first wife then hatched a plan where she would pretend to be a kitchen maid and would prepare his meals. In doing this, she slipped him the monogrammed handkerchief, which he recognized. You see, it turns out he had forgotten everything from before.
His new wife to be was then impressed by the first wife’s spinning wheel, scissors and distaff. So impressed that she agreed to have them, if she agreed to switch places with the first wife the night before the wedding. This is what happened and the first wife was able to remind the Lord of the Forest that he had a promise to her and he needed to follow through. So, he explained everything to his father the king and in time the kingdom and Felicity Castle was turned over to the prince. The two lived happily ever after.
Observations:
This tale has a lot of similarity with stories of the loup-garou. We are not told why it is the prince was turned into a hare, but the need to wear the pelts is very reminiscent of the loup-garou’s haire, which you can read about here. The use of terminology, such as “délivrer” (to deliver) for the freeing of the prince from his shapeshifting curse, is exactly the terminology used for the loup-garou. Also, we know that a loup-garou doesn’t need to take the form of a wolf specifically… he could just as much take the shape of a hare.
The glass mountain is an element of folktales found all throughout Europe. It shows up most often in Polish, Russian and German folktales. However the tale-type, Arne-Thompson 530 “Princess on the Glass Hill” is very widespread. This has lead some researchers to speculate that it forms a part of an Indo-European substrata or that it was important to equestrian peoples and so spread that way. Read more about those theories here.
This story collected by Marius Barbeau, as part of his contes populaire ethnographic series. It was recorded from storyteller Narcisse Thiboutot of Sainte-Anne, Kamouraska, in August 1915. Narcisse said that he had heard it about fifty years prior from his uncle Charles Francoeur. So, in about 1865, Narcisse heard the tale of the Felicity Castle. Of interest is the fact that the motif of the glass mountain seems to have met its geographic limit or spread in eastern France and as a result was not as popular as a tale-type amongst the French. How did this very popular tale-type in Eastern and Northern Europe make its ways to Kamouraska? There are certainly many theories, but in the end it is likely we will never know. What is important after all is that we keep telling the tale of the Felicity Castle for all the wondrous mythic tidbits it contains and let such works inform our future voyages.
Bibliographie
- Barbeau, C.-Marius. “Contes Populaires Canadiens. Première Série.” The journal of American Folklore 29, no. 111 (Jan-Mar., 1916): p. 42-46.
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