Le crapaud

English will follow

Une des créatures magiques que nous avons rencontrées et pris par surprise est le crapaud. Cet animal est tellement présent dans les contes et surprenamment dans les anecdotes, qu’on se serait attendu à ce que plus de ses caractéristiques magiques aient persistées jusqu’à aujourd’hui.

Le crapaud est une créature magique, le plus souvent malveillante, qui assiste le.a sorcier.ère, ensorcèle et prédit de mauvaises choses à venir. Les sources qui mentionnent que les crapauds étaient des assistants, peut être des familiers, des sorcier.ères sont peu nombreuses, mais très claires. On dit qu’en Beauce, les sorciers avaient comme compagnon des crapauds et des couleuvres, mais ces faits anecdotiques ne sont pas comparables à ce qui se passait en Europe où les crapauds est omniprésent lorsque l’on parle de sorcier.ères.

Ce qui est clair par contre, c’est l’association entre les crapauds et le surnaturel. Le crapaud peut être un messager de Dieu, mais qui doit être vu comme un avertissement. Il existe deux histoires de bûcherons qui ont reçu la visite d’un crapaud après avoir excessivement sacré. Le premier sacrait tellement qu’il arrivait à inventer des sacres. Un jour, en plein hiver, il s’exclama “S’il y a un bon Dieu, qu’il m’envoie un crapaud ici tout de suite”. Une bravade peu risquée, car on ne trouve généralement pas de crapauds en plein hiver, et pourtant, un crapaud que personne n’avait vu venir est apparu devant le bûcheron. Il n’est pas sans dire que le bûcheron fut terrifié. Une histoire similaire se serait produite à Jackman, mais il semblerait que le crapaud soit apparu de lui-même, sans que Dieu n’ait été défié, mais tout de même auprès d’un bûcheron qui sacrait énormément 1

Les crapauds annoncent aussi la pluie à en voir le nombre de prédictions qui les concernent3,4:

  • “Il pleuvra si on retourne un crapaud sur son dos”
  • “Il y aura du mauvais temps si les crapauds sont sur la terre”
  • “Un crapaud sur le chemin annonce de la pluie”
  • “Pluie à prévoir si les crapauds sortent nombreux le soir”
  • “On provoque le temps maussade en tuant un crapaud”

Bien que ceci puisse être utile en cas de sécheresse, on ne voit pas le crapaud de bon œil comme en témoigne ce contresort: “Quand on écrase un crapaud, il faut dire aussitôt: Je me défends de ton levain”3. Levain étant probablement utilisé pour dire venin, il semble que le crapaud soit vu comme une créature maléfique qui pouvait causer beaucoup de tort s’il était blessé. 

Une de mes histoires préférées concernant les crapauds en est une où des jeunes hommes croient avoir vu des feux-follet. Leur mère rejette cette possibilité du revers de la main et leur dit que “les soirs de pleine lune, les crapauds s’amusent à sautiller sur l’eau en sifflant, et que c’était l’éclat de la lune sur leur dos qu’on avait pris pour des feux-follets” 2. Je ne sais pas pour vous, mais l’explication me semble encore plus magique que l’apparition des feux-follets. 

Maintenant que nous avons une meilleure idée de comment le crapaud interagissait avec les Canadiens français dans la vie de tous les jours, il est maintenant temps de jeter au coup d’œil à sa représentation dans les contes. Dans un monde limité seulement par l’imagination, on peut voir que le crapaud sert des fonctions très similaires dans le quotidien.

Dans le conte “Les secrets du lion, de l’ours et du loup”, recueilli par Marius Barbeau, on nous parle des dommages qu’un crapaud sous le lit de quelqu’un peut causer. Dans ce conte, nous rencontrons deux orphelins très pauvres. L’un des deux se tourne vers l’autre et suggère qu’il rende l’autre aveugle afin d’obtenir de l’argent pour améliorer  leurs sorts. Cependant le frère voyant abandonne celui qui est aveugle à l’orée d’une forêt et le lance dans une rivière. Alors qu’il flotte dans la rivière, le frère aveugle arrive à se raccrocher à une branche et à se hisser sur la rive. Il grimpe alors à un arbre pour s’abriter contre les prédateurs. Lorsqu’il se trouvait dans l’arbre, un lion, un ours et un loup s’installe sous l’arbre. Les animaux discutent du roi qui est malade et comment la cause de cette maladie est un crapaud caché sous le lit du monarque. Le roi est aussi aveugle et selon les bêtes, une feuille de l’arbre où se trouve le frère permettrait de lui rendre la vue juste en la frottant contre ses yeux. Le frère ne fait ni un ni deux et se frotte les yeux avec une feuille et sa vue est restaurée. Il arrache quelques feuilles supplémentaires et les cache dans ses poches.

Le jeune homme s’en va donc trouver le roi. Des frasques s’ensuivent où il mentionne notamment qu’il peut guérir le roi pour cinq mille piastres. Il se rend dans la chambre du roi et déloge le crapaud de sous le lit et le roi se sent immédiatement mieux. Il guérit alors les yeux du roi pour sept mille piastres

Il fini par rencontrer à nouveau le frère qui l’a abandonné alors qu’il était aveugle. Très surpris de vois son frère guérit, ce dernier est vraiment désolée de l’avoir rendu aveugle et il demande comment il peut faire réparation. Le frère lésé lui dit de se rendre à l’arbre où il a surpris la conversation du lion, de l’ours et du loup et d’attendre là en faisant pénitence. Les bêtes, furieuses que leurs secrets aient été découverts regardent maintenant au dessus de leurs têtes en s’installant sous l’arbre. Ils voient le frère et ne perdent pas de temps pour le dévorer. 

Comme en est la coutume, le frère maintenant riche marie la fille du roi et vit heureux jusqu’à la fin de ses jours. 

Interprétation: Nous pouvons clairement voir qu’ici le crapaud est responsable pour la maladie du roi. C’est un motif commun dans le folklore, comme l’indique la référence plus haut par rapport à leur “levin”. 

Dans “Ti-Jean et la chatte blanche”, du même recueil par Marius Barbeau, nous rencontront une chatte blanche enchantée, secrètement une princesse, qui possède quatre crapauds. Ti-Jean la rencontre pour la première fois alors qu’elle puise de l’eau avec ses quatre crapauds dans son seau. Dans les aventures qui s’ensuivent, on dit à Ti-Jean de choisir le crapaud avec le plus de verrues et de le monter comme un cheval. Les frères des Ti-Jean sont enragés lorsqu’ils le voient arriver ainsi, mais après avoir attaché le crapaud dans l’écurie, celui-ci devient un magnifique cheval. Plus tard, la chatte blanche sort les trois crapauds restants de son seau et ils se transforment aussi en chevaux, à la Cendrillon. La chatte saute alors dans le seau et se transforme en princesse. La princesse et Ti-Jean, ainsi que leurs chevaux-crapauds, chevauchent jusqu’au royaume de la princesse où ils sont mariés et Ti-Jean hérite du dit royaume.

Interprétation: les crapauds sont associés à la magie de la chatte blanche en tant que ses familiers, mais ils sont aussi reliés à l’eau. Il est possible que cette eau soit imprégnée de leur magie qui assiste la princesse.


One of the magical creatures which we have encountered that has taken us by surprise is the toad. This animal is so present in the tales and surprisingly in the anecdotes, that one would have expected that more of its magical characteristics would have persisted until today.

The toad is a magical creature, most often malevolent, that assists the sorcerer, bewitches, and predicts bad things to come. The sources that mention that toads state that they were assistants, perhaps familiars, of sorcerers are few and far between, but they are very clear on this fact. It is said that in the Beauce, witches had toads and snakes as their companions, but these anecdotal facts are not comparable to what was known in Europe where toads are omnipresent when talking about witches.

What is clear, however, is the association between toads and the supernatural. The toad may be a messenger of God, but it should be seen more as a warning. There are two stories of woodcutters who were visited by a toad after some excessive cursing (using expletives) on their part. The first one was cursing so much that he was able to invent some cleaver ones as he went. One day, in the middle of winter, he exclaimed « If there is a good God above, let him send me a toad here right here and now ». Not a very risky one, as toads are not usually found in the middle of winter, yet a toad that no one had seen coming appeared in front of the woodcutter. It is not without saying that the woodcutter was terrified. A similar story is said to have happened in Jackman, but it seems that the toad appeared on its own, unchallenged by God, but still to a woodcutter who was known to curse so much (1).

Toads also foretell rain, as evidenced by the number of predictions about them (3,4):

  • « It will rain if a toad is turned on its back »
  • « There will be bad weather if toads are on the ground ».
  • « A toad on the path announces rain »
  • « Rain is to be expected if toads come out in large numbers in the evening »
  • « We cause dreary weather by killing a toad »

Although this can be useful in case of drought, the toad is not seen in a positive light, as shown by this counter-hex: « When one crushes a toad, one must say at once: I defend myself from your levain« . Levain probably being used to mean venom (Fr. venin), it seems that the toad was seen as an evil creature that could cause a lot of harm if one hurt them.

One of my favorite stories about toads is one where some young boys believed they had seen some feux-follets (Will O’ the Wisps). Their mother dismisses this possibility out of hand and tells them that: « On full moon nights, the toads have fun hopping around on the water whistling, and it was the glow of the moon on their backs that we mistake for feux-follets. » (2) I don’t know about you, but the explanation seems to me even more magical than the appearance of the feux-follets.

Now that we have a better idea of how the toad interacted with French Canadians in everyday life, it is now time to take a look at its representation in the folktales. In a world limited only by one’s imagination, we can see that the toad serves very similar functions there as in everyday life.

 In the conte “Les Secrets du lion, de l’ours  et du loup” collected by Marius Barbeau, we learn of the havoc a toad under one’s bed can cause. In this tale two orphans are quite destitute, one turns to the other and suggests – no word of a lie – that he blind his sibling so that they can get money in alms. However, the sighted sibling abandons the blind one at the edge of a forest and throws him into a river. While floating down the river, the blind sibling is able to grab onto a passing branch and pull himself out. This is when he decides to climb a tree to be safe from predators. While in the tree he comes to learn from eavesdropping on a lion, a bear and a wolf that there is a toad under the king’s bed that is making him sick. What’s more, the king is also blind and, according to the beasts, a leaf from the tree the orphan is in can restore sight just by rubbing one’s eyes with it! The blind orphan does just that and he can see. He then takes some of the leaves and puts them in his pocket. 

The young lad then goes off to find the king. Hijinks ensue, where he claims he can cure the king for five thousand piastres. He goes to the king’s chamber and kicks the toad out from under the bed and the king is restored to health. He then cures the king of his blindness for a cool seven thousand piastres. In time, the once-blind brother meets the one who abandoned him. Very surprised to see his brother healed, he is very sorry for having blinded him. He asks what he can do to make up for his offence… the now rich brother tells him to go up the tree where he was abandoned and to wait in penitence. The beasts, furious that their secret was discovered look up to the tree and see a boy. They waste no time in devouring him. As for the rich orphan, as is the custom… he married the king’s daughter and lived very happy all the days of his life. 

Interpretation:  Here we can see that the toad is associated with the magic of the White Cat, as her familiars, but also they are related to water. It could be that this water was imbued with their magic which assisted the princess.

In “Ti-Jean et la Chatte blanche” also from the same collection by Marius Barbeau, we encounter an enchanted white cat (who is secretly a princess) who has four toads. She is first encountered when she is fetching water with her four toads in a bucket. In the ensuing adventure, Ti-Jean is told to take the most warty toad and ride it like a horse. His brothers are enraged at such a spectacle, but after hitching it in the stable, it becomes a beautiful horse. Later, the white cat takes her three other toads from the bucket of water and they too become horses which draw her carriage, in a very Cinderella kind of way. Likewise, the cat hops into the bucket and she is revealed to be a princess. The pair and the toad-horses ride back to the kingdom where they are married, Ti-Jean inheriting the kingdom with his new bride. 

Interpretation:  Here we can clearly see that the toad is responsible for the sickness of the king. This is a common trope found in the folk belief, such as the reference above to their “levain” (venom) (3). 


Bibliographie

(1) DUPONT, Jean-Claude (1974). Le légendaire de la Beauce. Ottawa. Les éditions Garneau. 149 p.

(2) DUPONT, Jean-Claude (1987). Légendes des villages. Sainte-Foy. Éditions Légendes des villages.

(3) DESRUISSEAUX, Pierre (1976). Magie et sorcellerie populaire au Québec. Montréal, les Éditions Triptyques. 205 p.

(4) DESRUISSEAUX, Pierre (1982). Le livre des prognostics, dictons, croyances et conjuration du temps au Québec. Montréal. Éditions Hurtubise HMH limitée. 246 p.

BARBEAU, Marius. Contes populaires canadiens. The Journal of American Folklore, Vol. 29, No. 111 (Jan. – Mar., 1916), pp. 1-136+153-154

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